Nous connaissons les « lieux de
mémoire » comme des objets ou des institutions constitutives d'identités
culturelles et nationales. On se réfère généralement à des monuments, des
emplacements précis, réels ou abstrait, des faits chargés d'histoire
collective, marqueurs d'une identité nationale, régionale ou même villageoise.
Pourtant, la mémoire se transmet également par le corps représenté et par le
corps en mouvement. Les corps de ceux qui habitent ces lieux sont à la fois
dépositaires d'une mémoire individuelle mais aussi « incorporent » et fabriquent
une mémoire collective. À ce titre, peut-on dire que le corps, les corps
transmettent une culture, des événements ou des rituels traversant les siècles
? Ils se situent à l'interface de plusieurs problématiques et traduisent une
complexité parfois difficile à traduire sous d'autres formes. On analyse ici
comment le corps peut être à la fois lieu de mémoire et de transmission
d'histoire et d'un culte ancien toujours très présent dans la région de Naples,
celui de la Madone de l'Arc. Les processions rituelles liées à ce culte,
donnent lieu à une dévotion populaire (souvent combattue ou contrôlée par
l'autorité épiscopale) encore vivante, notamment par l'usage des images
(ex-voto), de la musique et de danses. Ce culte, organisé par une confrérie de
pénitents, les fujenti, est l'expression d'une culture portée par les couches
défavorisées face aux puissances publiques, politiques ou religieuses, où la
souffrance auto-infligée constitue une offrande et une expiation envers la Vierge. Ainsi, ne peut-on considérer le corps,
dans son expérience individuelle et
collective, comme un lieu de mémoire ? Comme vecteur d'une histoire et producteur de récit, d'un récit des corps ?
Ludmila Acone
lire
l'article en ligne : http://gerflint.fr/Base/Europe11/Acone.pdf
Abstract
We know “Places of Memory” as objects or as constitutive
institutions of cultural and national identities, usually in relation to
monuments, specific sites, real or abstract, to facts steeped in collective
history, markers of national, regional or even village identity. But the body
and bodies of those who live in these places are both repositories of an
individual memory as well as “incorporating” and participating in the creation
of the collective memory. As such, they can transmit a culture, events or
rituals through the ages. They are positioned at the interface of several
interrogations and translate a complex issue sometimes difficult to transmit
via other forms. This paper analyzes how the body can be both a place of memory
and history coming from an ancient cult, Madonna of the Arc, still present in
the region of Naples, and whose ritual processions give place to a popular form
of devotion (often opposed to or controlled by the “official” Church) still alive nowadays,
especially including the use of images (ex votos), of music and dances. This
cult, organized by a brotherhood of penitents, the fujenti, is the expression of
a culture carried on by disadvantaged social groups opposing to the political
or religious public powers, and where the self-inflicted suffering constitutes
an offering and an expiation given to the Virgin. Thus, we can consider the
body, in its individual and collective experience, as a place of memory, as a
historical object and as such, as a producer of narrative, the narrative of the
body
ill.: Gaetano Gigante ritorno da Madonna dell'Arco
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